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2- L’instituteur


Le 30 juillet 1901, Louis PERGAUD sort de l’Ecole Normale 3ème de sa promotion. Nommé à D’urnes pour la rentrée d’octobre, il quitte sans regret la maison de son oncle qui n’a pas su lui donner l’affection, la paix, le calme auxquels il aspirait. Sa première année se passe bien, malgré quelques accrochages avec une partie de la population lors d’élections municipales. Près de là, à La Barèche, il trouve, auprès d’une collègue, la tendresse dont il est depuis si longtemps privé. Fin 1903, il épouse cette institutrice. Son enthousiasme pour l’enseignement n’est pas grand. La poésie lui prend de plus en plus de temps. C’est aussi l’époque où Léon DEUBEL s’installe chez les PERGAUD. Louis est ravi, émerveillé. Mais Madame PERGAUD accepte mal la présence du poète. Ce sera un point de discorde qui rapidement envenimera les rapports entre les deux jeunes mariés.

Léon Deubel DEUBEL (photo ci-jointe) aide PERGAUD à mettre au point son premier recueil de poésies "L’Aube" qui paraîtra en avril 1904. C’est une joie qu’assombrit le départ de DEUBEL. Le 16 août naît Gisèle, qui décède 3 mois plus tard. Le bonheur, décidément, semble fuir Louis PERGAUD. Il a 22 ans. Son mariage est un échec. Sa fragilité morale lui fait envisager le suicide. Mais les lettres de DEUBEL le retiennent quelque peu. Les relations avec la population locale se détériorent. Comme son père, il doit abandonner son poste. La rentrée 1905 le conduira, avec sa femme, à Landresse.

Les tensions entre l’Eglise et l’Ecole républicaine sont vives à Landresse. On est en pleine affaire de la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Le climat familial n’a pas changé. PERGAUD se retrouve face à tous les ennuis possibles. Parfois, il fait front, mais maladroitement, et s’enfonce chaque jour un peu plus. Sa seule joie (mais quelle joie !) c’est la chasse. Il fréquente quelques bons chasseurs. Là, fusil à la main, chiens aux pieds ou à la course, au milieu des champs et des bois, il retrouve les parfums heureux de son enfance. Tard le soir ou tôt le matin, Louis PERGAUD écrit, prend des notes. Et puis, une maison lui ouvre grand sa porte, sa table, son foyer : celle de Jules DUBOZ. Ce cordonnier-cafetier, jovial, malicieux, d’une grande intelligence, a vite sympathisé avec ce jeune instituteur triste et apparemment désemparé. Louis PERGAUD se plaît à écouter les récits truculents de ce conteur né qu’est le "Papa DUBOZ". C’est un refuge, une source de bien-être, que la maison du "barbu" de Landresse !

Ce sera même bientôt un havre de tendresse. Car Jules DUBOZ a des enfants. Parmi eux, une jeune fille de 23 ans, Delphine. Douce, calme, simple, compréhensive, admirative, elle possède toutes les qualités propres à épauler, à consoler, à épanouir l’écrivain naissant qui n’a pas encore trouvé sa véritable voie. Louis PERGAUD a compris. Son ami DEUBEL le réclame auprès de lui à Paris depuis si longtemps ! Il se forge un nouveau destin. Sa vraie vie va commencer. Il efface ses années de souffrance morale. Il saute le pas : en août 1907, il prend le train pour la capitale, le coeur plein de sa Franche-Comté natale et de l’amour de Delphine. L’espoir d’une réussite au fond de lui-même, Louis PERGAUD va retrouver son maître littéraire, Léon DEUBEL. Cette amitié, c’est sa force du moment.